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La chronique : BRC, cela vous rappelle quoi madame la juge ? 1 septembre, 2007

Posté par benchicou dans : Algérie : analyses et polémiques , trackback

Par Mohamed Benchicou

Un fait, à l’allure assez quelconque, est venu nous rappeler, dans la torpeur du Ramadhan, l’incroyable déliquescence du pouvoir algérien, totalement dépassé par les évènements et incapable, désormais, d’assumer ses choix : l’affaire Brown and Root Condor. Il nous confirme, avec précision, que la corruption est bien au cœur de l’Etat et que le pouvoir algérien, après avoir châtié les journaux libres, dont Le Matin, qui avaient osé l’écrire, renonce aujourd’hui à le cacher.
Brown and Root Condor (BRC), pour ceux qui ne sont pas familiers des sagas du cercle présidentiel, est une société mixte algéro- américaine dirigée, en Algérie, par un certain Ould Kaddour, très proche des Bouteflika et de Chakib Khelil. Sa mission est, théoriquement, de se limiter à réaliser toutes sortes de travaux d’engineering pour le secteur pétrolier. Mais BRC, se découvrant un rare génie des affaires, s’investit, depuis l’arrivée de Chakib Khelil à la tête du ministère de l’Energie, dans une seconde et insoupçonnable vocation : celle de pompe à fric par laquelle s’enrichissent des notables et des individus peu recommandables sur le dos de Sonatrach. Le procédé est vieux comme la corruption : BRC bénéficie de diverses commandes complaisantes de la part de Sonatrach, allant de la construction du court de tennis jusqu’à la pose d’un sauna particulier, commandes qu’elle surfacture bien entendu, dont personne ne contrôle la réception et qu’elle honore par-dessus la jambe, confiant l’exécution à des sous-traitants. Les marchés entre Sonatrach et BRC, c’est-à-dire entre Ould Kaddour et Chakib Khelil, se passent à l’ancienne, entre gens de bonne compagnie, sans formalité administrative ni paperasse : autour d’un verre, le soir, au bord de la piscine. Selon l’Inspection générale des finances (IGF) qui enquête sur le scandale depuis février, Sonatrach a confié 27 projets à BRC pour un montant global de 7300 milliards de centimes sans avis d’appel d’offres, par le seul gré à gré, en violation de la réglementation des marchés publics. Passe-moi la rhubarbe, je te passerai l’oseille. On apprend aussi, et ce n’est une surprise pour personne, que BRC, chargée de finir puis d’équiper les deux tours Chabani qui abritent le nouveau siège du ministère de l’Energie, s’est donnée à cœur joie : la firme d’Ould Kaddour a confié les travaux à une société étrangère se contentant de prélever une marge bénéficiaire de 65 % et de multiplier les prix par 20 pour le moindre fauteuil acheté ! Ainsi, Sonatrach a déboursé, sans rechigner, 64.500 euros pour une salle à manger comprenant deux fauteuils, quatre oreillers et un traversin ; 82.000 euros pour un ensemble de cinq canapés ; près de 2,5 millions d’euros pour la décoration d’une salle de conférences. Sonatrach a même payé des travaux non exécutés ou certains autres faits sans l’aval du Pdg ! Au final, entre le montant frauduleusement versé au promoteur Chabani pour l’achat de ses deux carcasses, les travaux de finition surfacturés par BRC et les meubles en toc achetés au prix d’antiquités, ce sont des centaines de milliards qui ont quitté, par cette seule transaction suspecte, les coffres de Sonatrach pour des comptes particuliers. Mais qui l’ignorait ? La presse indépendante avait déjà révélé le scandale en août 2003, sans émouvoir personne. Pire : pour avoir divulgué le dixième des chiffres que révèle aujourd’hui l’IGF, Le Matin fut poursuivi en justice par Chakib Khelil, indigné qu’on pût douter de sa probité et une juge d’Alger, sensible à toutes sortes d’arguments, m’a condamné en qualité de directeur du Matin, ainsi que deux collègues journalistes, à trois mois de prison ferme ! Qu’en dites-vous aujourd’hui, madame la juge ? Il est au moins l’heure d’une question inévitable : qui a jugé non seulement recevable mais légitime la plainte du ministre Chakib Khelil au point d’envoyer en prison des journalistes pour avoir rapporté des faits vérifiés ? Le rôle joué par une justice complètement inféodée au pouvoir politique aura eu un catastrophique effet antinational : il a empêché l’éclatement de la vérité à temps. Elle était, ceci dit, dans son rôle d’appareil d’oppression. L’obstruction à la vérité sur les grandes malversations financières dans l’appareil de l’Etat empêche les vrais débats sur la nature du pouvoir. Dans son dernier livre L’exil est mon pays (Editions Heloise d’Ormesson), Isabelle Alonso a eu cette formule lumineuse : « La corruption est l’oxygène des dictatures ». Tout est presque dit. Le pillage des richesses nationales est le fruit de l’opacité politique, de l’étranglement des expressions, de la télé unique, du harcèlement des libertés. Merci, madame la juge, de nous l’avoir rappelé ! Mais avec le temps, le mensonge s’érode. Aujourd’hui, on le sait, bien que le ministre de l’Energie continue d’opposer à son homologue des Finances de piètres dénégations : il y a forcément quelque chose de vrai dans l’affaire Chabani-BRC. L’argent de Sonatrach a été volé par une camarilla en col blanc qu’il va falloir démanteler. Il a servi à l’achat de biens à l’étranger, à des soins à Genève, à des soirées et à tous ces marivaudages qu’autorise l’argent acquis facilement. Avec le temps, avec l’usure des arrogances et la poussée des opinions, se confirmera la véracité d’autres scandales révélés par la presse et ignorés par l’hypocrisie politique. On sait déjà que les tortures de Tkout ont bien eu lieu, en dépit des protestations outragées de certains généraux et celle, plus bigote, d’Ahmed Ouyahia. On devrait bientôt avoir des nouvelles des joyeux protagonistes de La Baigneuse. Douce revanche de la presse libre ? Pas seulement. L’avènement, même brutal et tardif, de la vérité sur la corruption et les basses pratiques de pouvoir est le signe d’une lueur démocratique. L’antichambre de la lumière. Alors, gardons nos plumes allumées.
M. B.
(Chronique parue le 26 octobre dans le Soir)

Commentaires»

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  1. Eh oui Moh! l’argent du contribuable fout le camps à l’étranger par des canaux normaux, comme au ministère des affaires étrangères où l’argent partait à Paris sous couvert de « rappels » et « primes » sur le compte de l’ex directeur du Centre Culturel Algérien et actuel DG de l’Institut du Monde Arabe de Paris Mokhtar Taleb Bendiab.

    Des centaines de milliers d’euros on été détournés de cette façon par Bendiab et ses copains.

  2. LA JUSTICE DITES-VOUS? ELLE EST POUR LES PETITS VOLEURS DE CORRECTIONNELLE PAS POUR LES PILLEURS DE L’ALGERIE.
    C’EST CETTE JUSTICE INFEODEE AU GVT COMME LE DIT MOHAMED BENCHICOU QUI A CONDANMé CE DERNIER.
    DE TOUTES LES FAçONS CE SERONT ENCORE DES LAMPISTES QUI PAIERONT.
    LA JUSTICE? IL Y A UN MINISTére DE LA JUSTICE MAIS LA JUSTICE …

  3. « Comment les officiers honnêtes ont été écartés pour que se réalise l’arnaque»

    La famille du Colonel MEKARNIA Directeur de la maintenance technique de l’hôpital Ain-Naâdja ( 1987 – 1996), décédé depuis, nous a fait parvenir cette « lettre d’outre tombe » du défunt dans laquelle il raconte un des épisodes de la grande « magouille BRC »

    J’ai été victime de ce scandale de BRC à travers la première magouille intitulé « le Centre des brulés de l’HCA » quand avec le directeur général nous avions dénoncé ce contrat imposé par les sieurs Lamar et Ghenim au mépris de la réglementation avec importation d’équipement hors cahiers de charge de la maintenance technique alors qu’il existait déjà une unité des brulés au niveau du service de réanimation chirurgicale. (Suite)

    Pour permettre à ce projet mafieux de continuer et de construire en toute impunité d’autres hôtels militaires, centres d’expertise , hôpitaux régionaux, il fallait de décapiter le staff de direction de l’hôpital Ain-Naâdja (qui soit dit en passant était l’une des institutions qui a su assumer sa mission comme hôpital de référence et ce grâce à un directeur général incorruptible au demeurant émérite professeur en cardiologie et diplômé en gestion hospitalière du Val de Grâce de Paris.
    Ainsi tous ces officiers, avant la limite d’âge, ont été mis comme moi à la retraite et face à cette injustice qui a constitué pour moi un autre facteur de risque, j’ai fait un infarctus du myocarde pour mourir aux urgences de cet hôpital que j’ai tant chéri.
    Et le mensonge et l’hypocrisie va plus loin car à la demande de Monsieur le président de savoir ou était le staff de cet hôpital qu’il connaissait on lui répondit qu’ils ont demandé leur retraite (belle réplique que celle du président : « ils sont partis à la retraite ou vous les avez poussés un peu ? » )
    Voila madame la justice algérienne ce qui arrivent aux cadres qui essaient de réagir là ou vous deviez le faire.
    Des cadres comme ça font légion : mis à a retraite avant l’heure, honneur sali, jetés en prison quand ils ne sont pas liquidés physiquement.
    Un général qui demande de violer la règlementation pour octroyer à son fils des examens de médecine là ou il a échoué ou qui veut imposer l’achat de médicaments par un autre rejeton ou qui intervient pour fermer une boutique de malade parce que ce dernier n’a pas été associé à sa sous-traitance…
    C’est cette corruption qui a mené l’Algérie au bord de la guerre civile et qui par pourriture a engendré ces vers qui ont porté atteinte à notre religion et qu’on ose encore appeler les islamistes alors qu’ils ne sont que la putréfaction de cette façon de gérer le pays.
    Je suis peut être mort mais je vois d’ici qu’un tsunami est entrain de déferler sur ces incompétents et sur cette rapine pour rendre justice à ces cadres mais surtout à ceux qui n’ont pas hésité à offrir leur vie pour l’indépendance de ce pays ! Pas pour que des prédateurs en font une propriété privée pendant presque un demi siècle …
    Je vous propose la création d’un blog pour dévoiler toutes les corruptions et forcer la loi de réagir en mettant nu les agissements des uns et la réaction des autres car notre justice est encore étranglée par l’exécutif, là où se nichent les prédateurs… Nous forcerons ainsi, par la transparence, la bonne gouvernance.

  4. On a cette tendance à croire que tout est fichu, que c’est comme ça la mondialisation, que des crimes et délits peuvent rester impunis, que des fonctionnaires au service de l’Etat sont intouchable, que la justice n’existe que pour effrayer la plèbe et la contenir dans son ghetto.

    Alors que tout n’est que question de temps.

    Viendra le jour ou on demandera des comptes, et dans bientôt, à tout les magistrats qui ont accepter de ce bander les yeux devant l’un des pire crime contre l’humanité,

    celle de l’aliénation de tout un peuple.

    La justice n’est pas une illusion

  5. ne pas accabler ni confondre Sonatrach. le pdg de cette entreprise n’est qu’une marionnette aux mains de chakib khellil et ses sbires. Rien ne se décide sans l’accord du ministre qui en fait est le seul responsable de sonatrach. Le pdg, un pauvre homme honnete père de famille est juste là pour servir d’éventuel fusible.

  6. comme le suggére « moutarem »

    Un bolg de dénonciation avec des preuves de toutes sortes de crimes et magouiles serait une initiative salutaire pour notre pays.
    Pendant que le fer est chaud battons-le.
    Il est plus que temps de déchirer les voils de toute cette mafia de l’ombre.Que toutes les personnes qui ont vécu l’omerta s’expriment,c’est leur devoir.L’espoir ne renaîtra qu’avec la vérité sur les responsabilités des corrompus et corrupteurs.
    Les masques doivent tomber pour laisser place à la renaissance d’une nouvelle algérie.

  7. c’est le genre d’article que j’aime voir sur ce blog.merci monsieur benchicou

  8. Chakib Khelil est de nationalité Américaine,les Algériens doivent le savoir donc bouteflika qui l’a nommé est complice de ces détournements a grandes échelles,mais là ou le bat blesse c’est de les voirs tous les jours déambulés en toute liberté c’est ce qui me fait mal alors que le pauvre Algérien même innocent,risque du jour au lendemain d’être arrêté pour rien du tout c’est la hogra version Bouteflika et dire qu’il y’a encore des gens qui essayent de le défendre.

  9. Au lieu de se cristaliser sur les échéances élèctorales , nos Services de securité et de contre-espionnage devraient fouiner un peu plus dans ces affaires El-KHALIFA et BRC , parmi d’autres, qui sentent un peu la trahison , la félonie et l’intelligence avec la main étrangére. Ces affaires sont trés graves et trés serieuses pour s’en remettre aux discours et aux déclarations apaisantes de nos gouvernants.
    Ghanima , Béjaia

  10. les maitres de la haute trahison ,d intelligence avec la main étrangère , du pillage de l économie du pays dans des affaires
    ( comme : khalifa ,brc … ), ne sont autres que nos services de sécurité et de contre espionnage .
    ces services sont les réels artisans de la situation du pays .
    ils semblent etre indéboulonnables .
    rappeler vous juste lamari a été ministre de la défense de 3 présidents .
    mediène est à la tete des services depuis plus de 20 ans .
    smain lamari a attendu d etre mort ( de je ne sais quoi ) pour quitter son service . dernière nouvelle , il aurait vraiment quitté son poste .
    l une de leurs spécialités reste la manipulation qui leur est reconnu sur le plan international , par leur maitres étrangers ,
    d ou la collision des interets étrangers avec les interets de ces services au détriment de l algérie .
    meme l état algérien ne représente rien aux yeux de ces services .
    d ou quand on parrle de luttes pour le pouvoir , c est pour désigner la drs et l état .
    vous pouvez toujours demander aux services d enquèter !
    ils sont les artisans de notre descente aux enfers .

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